Avant-propos
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Introduction à la controverse des Karmapa
Quelques données historiques
1959 : Le Karmapa s'exile en Inde
Les difficultés au temps du 16ème Karmapa
Les années 80 à 90
Les évènements de 1992
Les évènements de mai et juin 92
Campagne de propagande
Orgyen Trinley, le Karmapa de Sitou Rinpoché
Les événements de novembre et décembre 1992 à Rumtek
Informations concernant le Sikkim
Année 93 : la situation dégénère à Rumtek
Identification du 17ème Karmapa Trinley Thayé Dorje
L’année 1994
La controverse : confrontation des points de vues
Les rapports entre Shamar Rinpoché et le Dalaï-Lama
Survol des événements des années 1994 à 1999
Année 2000
Année 2001
Chronologie des événements
Bibliographie et sources d’informations
Accès pages en anglais
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La controverse : confrontation des points de vues

Comment le public a t-il pris position ?

L’ignorance et la désinformation

Les parties en présence

Shamar Rinpoché
Sitou Rinpoché

L’opinion des Pro-Sitou par rapport à la controverse

Que pensent-ils :

de l’expertise de la lettre de Sitou Rinpoché ?
de l’agression et de l’expulsion des moines de Rumtek en 1992 ?
de l’attaque du KIBI en 1996

À propos du soi-disant rapprochement Karmapa/Dalaï-Lama

Les livres sur Orgyen Trinley

Article de Thrangu Rinpoché sur la controverse


Comment le public a t-il pris position ?

Il est intéressant d’analyser la manière dont le public concerné a pris position dans cette affaire. Lorsque l'on parle de "public concerné", on entend non seulement les Tibétains, mais aussi les occidentaux qui se réclament du bouddhisme.

En 1992, lorsque Sitou Rinpoché montre sa lettre, Shamar Rinpoché s’y oppose. Du côté de Sitou Rinpoché, le coup est bien monté : non seulement il a "la lettre" que tout le monde cherche depuis 11 ans, mais il a aussi le soutien du Dalaï-Lama et en plus, il obtient de Shamarpa la signature de la reconnaissance d’Orgyen Trinley.

A priori, le grand public a toutes les raisons de lui faire confiance. Il est l’un des quatre Rinpochés, il a rempli son rôle, et comme il a recueilli le cœur du 16ème Karmapa lors de la crémation, il est tout à fait légitime que ce soit lui qui retrouve le tulkou. La propagande orchestrée par le "Comité Dergué" a parfaitement fonctionné (et fonctionne encore aujourd’hui). Le grand public lui fait confiance, le Karmapa est retrouvé, il n’y a plus de questions à se poser, le problème est donc résolu.

De plus, Orgyen Trinley, l’enfant choisi, possède un immense charisme. Il est beau, reflète une grande puissance de caractère et surtout, ressemble physiquement au précédent Karmapa. Sur beaucoup de photos, ce dernier présentait un œil plus ouvert que l’autre. Surprise ! L’enfant à cette même particularité ! Cela va convaincre beaucoup de monde. On verra même sur internet des photos-montages où le portrait du 16ème Karmapa se transforme parfaitement en celui d’Orgyen Trinley. Le Karmapa aurait le même visage bien que ses parents soient différents ! Cette idée aura la peau dure. Lorsque Thayé Dorje est découvert, pour beaucoup, la photo de l’enfant est décevante : il est plutôt gringalet, pâle et … il porte des lunettes !

Revenons en 1992, à ce moment-là, Shamar Rinpoché est seul, soutenu seulement par ses disciples et ceux qui lui font confiance. Il conteste, mais n’a pas beaucoup d’éléments pour le faire : la contre-expertise de la lettre lui est refusée et sa signature de la reconnaissance d’Orgyen Trinley est un handicap de plus. En effet, nombreux sont ceux qui ne comprennent pas pourquoi il refuse l’enfant qu’il a lui-même accepté antérieurement. Ils pensent, en toute bonne foi, qu’il est animé de mauvaises intentions.

Shamar Rinpoché n’incite d’ailleurs personne à le suivre. Ceux qui le contacteront pour en savoir davantage sur sa position, expliquant qu’eux-mêmes ont des doutes et ne savent plus qui croire, l’entendront répondre qu’il ne cherche à convaincre personne, que chacun doit analyser en son âme et conscience la situation et que les choses s’éclairciront progressivement. Il ne cherche à convaincre personne.

À cette époque, beaucoup de personnes (mieux informées que le grand public) restent sur l’expectative. Des irrégularités ont été commises : la reconnaissance du Dalaï-Lama, la précipitation qui a accompagné cet épisode, l’intronisation sous le contrôle et la bénédiction des chinois, la réticence de Shamarpa…

Durant les deux années qui vont suivre (1992 et 1993), c’est principalement les agissements irrecevables du camp de Sitou Rinpoché qui vont amener les personnes relativement bien informées, jusque-là hésitantes, à prendre fermement position pour Shamarpa. À ce moment, Shamar Rinpoché ne propose toujours pas d’alternative à Orgyen Trinley. Mais les agissements des opposants sont convaincants : la tentative de révoquer le "Karmapa Charitable Trust" en novembre 1992, les exactions faites sur les moines de Rumtek, la collusion avec les politiques et avec Dharamsala, et, en point d’orgue, l’attaque sur Rumtek en août 1993.

Nous parlons délibérément des "personnes relativement bien informées" car pour le grand public, qui avait accepté la lettre de Sitoupa, il n’y a aucune raison de revenir sur ce fait établi. En effet, le Dalaï-Lama ne cesse de confirmer cette reconnaissance et, même en Inde, tous les événements sont transformés par la propagande du camp de Sitou Rinpoché. Durant l’attaque de Rumtek, les moines du monastère ont même été accusés d’avoir agressé les "pacifiques promeneurs" venus accompagner Sitou Rinpoché (voir plus loin).

La publication des "Karmapa Papers" apporte un éclairage nouveau sur les nombreuses falsifications. Ce qui était jusqu’à présent assez obscur devient maintenant très clair. Il est désormais évident que Sitou Rinpoché a fabriqué une lettre. Cette allégation est renforcée par le refus total de Sitou Rinpoché d’une expertise. Pourquoi ? De deux choses l’une, soit cette lettre est vraie, l’expertise le confirme, et tous les problèmes cessent, soit elle est fausse… ce qui expliquerait ce refus systématique.

Puis, en mars 1994, Shamar Rinpoché annonce enfin le fruit de ses efforts : l’existence, puis la présentation de Thayé Dorje. Il raconte dans le détail tout le processus de reconnaissance qui a duré huit années.

Il est intéressant de constater que dans cette reconnaissance, Shamar Rinpoché n’apporte pas des preuves tangibles et irréfutables. Certes, l’enfant a affirmé à plusieurs reprises qu’il était le Karmapa, le processus de reconnaissance a eu lieu, mais il n’y a pas de lettre ou de message tangible venant du 16ème Karmapa, comme tout le monde l’attend. Il y a bien ce mystérieux disciple du 16ème Karmapa qui paraît agir comme un guide dans cette recherche, mais Shamarpa le tient secret. Existe-t-il vraiment ou non ? Il n’y a pas de preuve…

Mais ce qui convainc avant tout, c’est la manière de faire de Shamarpa. Contrairement à son pair, il agit avec circonspection. Il ne se salit dans une aucune manigance politique ni aucune malversation, ne fait pression sur personne pour convaincre, réagit avec patience et tolérance à tous les affronts et les irrégularités qui sont lui faits, bref, il agit en véritable maître spirituel, digne de reconnaître le Karmapa.

En somme, durant cette période, et jusqu’à la présentation de Thayé Dorje, l’adhésion à la position de Shamar Rinpoché s’appuie avant tout sur un refus des agissements de Sitou Rinpoché.

L’ignorance et la désinformation

Cette controverse est alimentée par une méconnaissance totale des événements et par une désinformation bien orchestrée.

À la lecture du récit de tous les faits dramatiques qui se sont déroulés de 1992 à 1994, on peut se demander comment certaines personnes ont pu soutenir Sitou Rinpoché, compromis dans de tels agissements. On est impatient de savoir quels sont les arguments étayant de tels comportements.

En fait, les exactions qui ont eu lieu durant cette période ont été passées complètement sous silence ou ont été totalement déformées (voir plus loin). Tous les écrits ou les documents émanant des supporters de Sitoupa passent totalement les faits sous silence. L’histoire qu’ils racontent est idyllique : le précédent Karmapa a écrit une lettre, elle a été retrouvée en 1992 et le Dalaï-Lama l’a confirmée. Le reste n’est que broderie allégorique racontant les miracles apparus lors de la naissance de l’enfant et tous les prodiges qui se sont manifestés par la suite…

Nous sommes dans un système où la confiance et la dévotion envers les maîtres sont des valeurs centrales et essentielles. Mais beaucoup de confusion dans la compréhension de ces valeurs mène à une naïveté qui confine parfois à l’aveuglement. Aussi, dans cette histoire assez complexe, la grande majorité des personnes se contente d’épouser l’opinion de leur maître respectif sans exercer le moindre esprit critique et sans chercher plus d’information.

Côté Shamarpa, il n’y a aucune information. Voici un seul exemple pour illustrer la situation : Shamarpa a demandé qu’un site internet soit créé sur la controverse Karmapa. On y trouve une information indigente qui ne dépasse pas la dizaine d’articles. Il n’y a rien sur internet concernant la lettre de prédiction, ni sur les événements des dix dernières années, seulement quelques déclarations éparses. Cela reflète d’ailleurs parfaitement la position de Shamarpa. Jusqu’à l’arrivée d’Orgyen Trinley en Inde, il n’a jamais cherché à fournir beaucoup d’information. Les centres qui le soutenaient sont restés très longtemps dans le silence et l’attentisme. Une rare exception, les disciples d’Ole ont écrit un livre bien documenté mais très partisan, mélangeant l’histoire de la controverse à un récit allégorique de l’activité de Ole Nydahl. Le titre, assez significatif "Rogues in robes" ("Bandits en habits") donne le ton de l’ouvrage qui ne remporta qu’un succès limité, Ole étant un personnage contesté, notamment en France.

Quand que la controverse a-t-elle débuté ?

Il faut se replonger dans le contexte et bien comprendre certains points majeurs qui vont déterminer les événements futurs.

Jusqu’en 1992, date à laquelle Sitou Rinpoché révèle la soi-disant lettre de prédiction, tout va pour le mieux dans la grande famille Kagyu. Les quatre Rinpochés sont présents, tout le monde leur fait confiance, bien que l’on commence à leur reprocher leur lenteur dans la recherche du 17ème Karmapa. Le témoignage des moines de Rumtek (voir l'introduction du "Siege of Karmapa") est très parlant : tout le monde leur fait confiance sans aucune réserve.

Puis, tout à coup, c’est le clash : Jamgueun Kongtrul disparaît subitement dans un accident de la route. Il était incontestablement le préféré de la lignée. D’une grande intelligence, diplomate, il était celui en qui tous avaient confiance. Il assurait la cohésion avec les autres Rinpochés. En effet, Shamarpa apparaissait comme entier et peu diplomate, Sitou Rinpoché comme indépendant et politique, Gyaltsab Rinpoché comme influençable et peu charismatique.

Les trois autres Rinpochés se déchirent alors au sujet de la reconnaissance du Karmapa. C’est là que le caractère des uns et les manipulations des autres vont se révéler déterminants.

Les parties en présence

Shamar Rinpoché

Il ne fait pas grand-chose en terme d’image. C’est un personnage entier, d’une grande intégrité ne faisant aucun effort pour plaire à autrui. Il est simple et déteste l’apparat dû à son rang. Il est peu connu dans le monde tibétain, car il a été banni durant deux siècles. Les anciennes générations ne l’ont pas connu et il ne fait rien pour rattraper ce retard. Quand une chose ne lui plait pas, il s’en va. En 1983, lors de la fameuse initiation du Rinchen Terzeu, il quitte subitement les cérémonies, sans donner au public la moindre explication. Les nombreux participants sont à mille lieux d’imaginer les raisons réelles de son départ précipité et se laissent aller à de multiples interprétations. La plupart sont des disciples de Kalou Rinpoché. Ils considèrent qu’il a manqué de respect envers leur maître qui dispense les initiations, et qu’il est d’un tempérament colérique et insociable. Cette opinion est importante car les disciples de Kalou Rinpoché, lors du clash de 1992, en viendront tout naturellement à faire davantage confiance à Sitou Rinpoché.

Sitou Rinpoché

C’est un lama très populaire chez les Tibétains. Dans le passé, il dirigeait le puissant monastère de Palpung au Kham. Son prédécesseur était le précepteur du 16ème Karmapa. Il a un côté charmeur et il sait se faire apprécier.

Ses manipulations

- Avec l’histoire du cœur du 16ème Karmapa qui n’a jamais été remise en cause jusqu’en 1992, il a marqué un point déterminant dans l’esprit des disciples. Pour beaucoup, Il est celui que le 16ème Karmapa a choisi. Cette assertion a été diffusée par le "Comité Dergué" en 1992. Elle est devenue un argument imparable, très largement repris par les centres soutenant Sitoupa. Pour eux, il est clair que Sitou Rinpoché a raison car le 16ème l’a reconnu comme son fils spirituel.

- La soit-disante lettre de prédiction correspond à ce que tout le monde attend depuis onze ans.

- Sitou Rinpoché va reconnaître des tulkous importants de la lignée et, de ce fait, recevoir en retour la gratitude des disciples de ces maîtres. C’est le cas notamment de Kalou Rinpoché, Trungpa Rinpoché. Il fait également reconnaître Jamgueun Kongtrul et Pao Rinpoché par Orgyen Trinley.

- Mais la carte maîtresse de Sitou Rinpoché est la reconnaissance qu’il parvient à obtenir du Dalaï-Lama. Cette reconnaissance est essentielle car elle assoit désormais la légitimité de Orgyen Trinley, et l’on ne parle plus beaucoup de la lettre de Sitou Rinpoché.

L’opinion des Pro-Sitou par rapport à la controverse

Pour l’immense majorité des personnes reconnaissant Orgyen Trinley comme le Karmapa, il n’y a plus aucun doute : tout le processus de reconnaissance a été accompli et les gens sont parfaitement sincères par rapport à cela. Ils ont d’ailleurs la caution du Dalaï-Lama. Ils ne comprennent pas pourquoi il faudrait faire une étude scientifique de la lettre et en ignorent bien sûr son caractère douteux. Pour eux, l’attitude de Shamarpa est incompréhensible. Il apparaît comme malveillant et jaloux. Toutes les tracasseries administratives subies par leur camp (bannissement de Sitoupa, délai d’attente pour le statut de réfugié d'Orgyen Trinley) seront perçues comme des manipulations de Shamarpa en cheville avec l’Armée et les Services secrets indiens.

Sitou Rinpoché manifeste l’attitude de quelqu’un en position de parfaite légitimité, ne cherchant aucunement à se justifier : il a raison, les choses sont ainsi…et c’est tout. C’est ce qu’il explique d’ailleurs au journaliste de Asiaweek, en octobre 2000 concernant Orgyen Trinley : "Il n'y a rien à prouver, c'est déjà prouvé". (.) "Le Karmapa est le Karmapa, le Bouddha est le Bouddha, le Dalaï-Lama est le Dalaï-Lama. Nous sommes des croyants. C'est ainsi".

Dans le bulletin Sherab Ling Newsletter de déc. 92, Sitou Rinpoché donne son avis sur la controverse : "Suite aux quelques incidents lors de l'annonce du 17ème Karmapa, notamment en Allemagne et en France, où quelques personnes mettent en doute l'authenticité de S.S. le 17ème Gyalwa Karmapa, je voudrais dire ceci : Nous sommes bouddhistes et nous prions avec compassion pour les personnes impliquées à diffuser la confusion. C'est tout ce que nous pouvons faire. Nous ne devons pas nous décourager par ce qui arrive. Nous devons savoir que lors du vivant du Bouddha, nombreuses personnes n'ont pas cru en lui, y compris son propre frère. Si cela est arrivé, il y a 2500 ans avec le Bouddha, pourquoi pas aujourd’hui avec Sa Sainteté Karmapa ? Cela n’aurait pas dû arriver et cela aurait été beaucoup mieux, mais c’est arrivé. Le Bouddha a traité la situation avec compassion. Nous n‘avons pas besoin de faire autre chose, ni de concéder quoi que ce soit aux gens qui s’égarent, parce que cela contribuerait à leur mauvais karma. Nous prions pour eux, nous leur dédions le mérite, afin qu’ils cessent d'accumuler du karma négatif et qu’ils deviennent plus sages.

Dans tous les monastères, les rinpochés et les lamas sont satisfaits et confiants. Notre lignée possède désormais une tête. Nous avons survécu sans notre chef de lignée durant presque une douzaine d'années et maintenant nous le suivons. Ainsi, je suis sûr que chacun d'entre nous aura un avenir radieux. Vous devez savoir, que nous ne sommes pas ici pour convertir les gens, nous ne devons pas contraindre les autres, ni les forcer à nous croire de quelque façon que ce soit. Notre responsabilité la plus importante, est la préservation de notre enseignement, de notre tradition, de notre lignée. Aussi, lorsque des personnes intéressées viennent à nous, nous leur donnons quelque chose. Si nous ne préservons pas ce que nous avons, nous n'aurons plus rien à leur donner. Si nous n'avons rien, nous ne pouvons feindre d'avoir quelque chose à donner. Ce serait un mensonge. Nous devons préserver les enseignements. La transmission se produit s'il y a quelque chose à transmettre.

Certaines personnes affirment qu'elles ne croient pas en Karmapa. Face à cela, que pouvons-nous faire ? Elles ne croient pas. Nous ne pouvons pas anéantir notre lignée, ni tout ce que nous avons parce que telle personne n'y croit pas. Si nous préservons et pratiquons les enseignements, d'autres en verront la qualité. Mais nous n’avons pas à gagner la foi de quiconque. Ceci n'est pas notre motivation. Combien de personnes sur cette terre savent que le Bouddha a existé ? Si certains ne le connaissent pas, cela n’enlève rien à son existence. Lorsque leur bon karma sera arrivé à maturité, les gens se réveilleront. Et si cela n'arrive pas dans cette vie, cela se produira dans la vie suivante".

Que pensent-ils de l’expertise de la lettre de Sitou Rinpoché ?

Dans une interview, Thrangu Rinpoché, un important lama érudit de la lignée Kagyu répond à cette question et résume bien l’opinion généralement partagée sur ce problème :

"Personnellement, je pense que c'est inutile, parce que les documents laissés par les quinze Karmapa sur leur précédente réincarnation, n'ont jamais été soumis à un examen légal. Chaque fois qu'il y a eu controverse, les disciples l’ont finalement résolue grâce à leur foi en Karmapa et à ses bénédictions. De même, dans le cas présent, il n'est pas nécessaire de faire examiner les documents par des experts. En fait, nombreux moines de hauts rangs et pratiquants ont, par leur compassion et leur sagesse, désigné clairement qui est le Karmapa. Tout que nous avons à faire c’est nous soumettre à ce qu'ils disent. En outre, l'examen légal est généralement employé contre des criminels. Les documents de prédiction laissés par les Karmapa sont non seulement sacrés, mais aussi bénis. Les examiner comme s'il s’agissait de documents laissés par des criminels est plutôt étrange du point de vue religieux. Sur la base de ces deux raisons, l'examen légal des documents est inutile."

Le camp de Sitou Rinpoché considère que cet examen profanerait l’objet sacré. Et qui plus est, il faut ajouter que très peu de personnes savent exactement pourquoi Shamarpa veut cette expertise. La brillante analyse de la lettre, publiée dans les "Karmapa Papers" n’a pas été diffusée et très peu l’ont lu.

Sur le site internet de Nalandabodhi, http://www.nalandabodhi.org/news.html, principal site sur la controverse animé par les supporters d’Orgyen Trinley, il existe une explication des raisons pour lesquelles une expertise graphologique serait inutile.

Que pensent-ils de l’agression et de l’expulsion des moines de Rumtek en 1992 ?

Dans le "Sherab Ling Newsletter" d'automne/hiver 1993, il est décrit la version suivante :

"Tai Sitoupa Rinpoché, à la demande du Comité administratif de Rumtek et de l'Institut Nalanda d'Etudes Supérieures (Nalanda Institute for Higher Studies), est allé à Rumtek à la fin du mois de juillet. Une de ses premières activités était d'ouvrir le traditionnel Yarney ou retraite de "la saison pluvieuse", le 2 août. La retraite de Yarney a été observée chaque année à Rumtek depuis la fondation du monastère. La tradition date du temps de Bouddha, qui se retirait avec ses disciples chaque été pendant la mousson, pour prier et méditer. De nombreuses retraites de saison pluvieuse ont été passées dans Vaishali, situé maintenant dans l'état indien d'Uttar Pradesh. Les cérémonies d'ouverture de Yarney préparent à ce mois complet d'études et de prières.

Cette année, une petite faction dissidente de moines s'opposant à la visite prévue du 17ème Gyalwa Karmapa, a tenté de perturber la célébration des cérémonies Yarney. Tôt le matin, les moines ont fermé la porte du temple, espérant ainsi empêcher les cérémonies et arrêter la retraite. Cependant, Tai Sitoupa et Gyaltsab Rinpoché, accompagnés des moines de l'Institut Nalanda et des moines du monastère, ont continué les prières, assis par terre, à l'extérieur du temple Les moines scélérats se sont barricadés dans le réfectoire. À la demande de rendre les clefs, ils ont crié des injures et ont ensuite lancé des pierres et des briques sur les gens. Certains ont souffert de blessures mineures. La police du Sikkim, et un représentant du gouvernement, présent à ce moment-là, ont essayé de calmer la situation par la discussion. La police a été renforcée. Finalement, tout s'est résolu en soirée lorsque les moines ont abandonné les clefs. Une réserve de briques et d'autres objets a ensuite été découverte dans la salle à manger.

Les cérémonies se sont tout de même déroulées et la retraite de Yarney a pu commencer à l'heure prévue. Une initiation de Tara Blanche, demandée par une famille locale, a cependant dû être remise. Après ce malheureux incident, une lettre de protestation a été rédigée à l'attention de Shamar Rinpoché, signée par 220 disciples tous témoins de l'événement. Cette lettre décrit la situation en détail et contredit un fax grossier, diffusé vraisemblablement par la même faction, faisant de nombreuses fausses allégations sur les événements et sur certains lamas seniors. Un "Comité d'Action Commune" (Joint Action Committee) a été mis en place par des bouddhistes sikkimais concernés, afin de résister à l'avenir à de tels incidents au monastère. (Voir le chapitre concernant ce fameux "Joint Action Committee").

Dans ce communiqué, il est fait mention d’une lettre envoyée à Shamar Rinpoché, par 220 disciples locaux du monastère :

Voici la lettre :

"À Son Éminence Shamar Rinpoché, Rumtek, Sikkim - le 1er août 1993.

Rinpoché,

Nous, les soussignés, ont été les partisans dévoués de Sa Sainteté le Karmapa. Comme vous le savez, nous avons aussi été vos partisans dévoués ainsi que ceux des trois autres régents, d'autres rinpochés et de tous les moines. Vous vous rappellerez que chacun d'entre nous, les signataires, a apporté sa contribution, tant par son effort physique que financier, chacun selon ses propres capacités, depuis 1959 lors de la fuite du Tibet par Sa Sainteté le 16ème Gyalwa Karmapa. A cette époque, nous étions seulement heureux que Sa Sainteté ait demandé l'asile au Sikkim. Pendant cette période difficile du début des années 60, c'est nous, les bienfaiteurs sikkimais, qui ont aidé à établir le "Centre Dharma Chakra" de Rumtek. Ceux qui le pouvaient ont offert de l'argent, d'autres de la nourriture, tandis que certains ont réellement porté des pierres, de la terre, du ciment et des barres. Vous êtes conscient de tout cela.

Hier, 2 août, nous sommes venus au "Centre Dharma Chakra" de Rumtek pour prier à l'occasion de Yarney (la session de retraite d'été) et pour recevoir la bénédiction des deux régents, leurs éminences Tai Sitou Rinpoché et Goshir Gyaltsab Rinpoché. En arrivant, nous avons trouvé le dukhang (le lieu saint principal) du monastère fermé à clef et les deux régents accompagnés des moines du shedra (Institut Nalanda), assis sur le sol froid à l'extérieur du monastère et conduisant-là les cérémonies. Les moines du monastère s'étaient barricadés à l'intérieur du réfectoire. Lorsque nous leur avons demandé d'ouvrir les portes, ils nous ont lancé des briques et des rondins. Certains d'entre eux tenaient même des hachoirs à viande et des couteaux. Qu'il soit clair que nous n'avions rien dans nos mains à l'exception d’écharpes blanches.

Qu'il soit également clair que le Ministre de l'Intérieur du Sikkim, le Secrétaire Ecclésiastique et la police étaient tous témoins de cela. Lorsque ces moines nous ont lancé des pierres, des briques, il y avait des enfants et des bébés parmi nous. Qu'il soit toujours clair que parmi les moines barricadés à l'intérieur, trente à quarante moines âgés de moins de dix ans se trouvaient là, forcés de se livrer à ces activités illégales. Si nous avions exercé des représailles, ces jeunes moines auraient certainement été blessés et sacrifiés pour complaire aux volontés des perturbateurs.

Il est clair pour nous, que tous ces problèmes sont la cause de votre mauvaise décision. Les moines du monastère ont agit de la sorte parce que vous avez semé les graines de la discorde, et que vous avez ensuite disparu. Vous n'avez pas essayé d'apporter l'harmonie entre les moines du shedra et les moines de monastère. Vous avez menacé d'abandonner les moines du shedra et vous les avez ensuite sommairement écartés, sous prétexte de jour férié. Vous savez parfaitement que, dans la constitution de l'Institut Nalanda, page 5, il est clairement écrit selon les vœux du 16ème Karmapa, que les moines du shedra et les moines du monastère suivront ensemble la retraite de Yarney.

Si vous aviez conseillé de ne pas accomplir cette retraite, tant pour les moines du shedra que pour ceux du monastère, alors, cela aurait été un acte impartial. En prenant parti contre les moines de l'Institut Nalanda, vous vous êtes révélé être indigne et partisan. En outre, les moines du monastère ont fermé les portes pour empêcher les moines du shedra d'effectuer la retraite d'été. Ces derniers ont finalement pu commencer leur retraite, retraite qui jusqu'à présent, n'a jamais été annulée. Les deux régents accompagnés des moines du shedra se sont assis par terre afin d'accomplir les cérémonies de Yarney. Les moines du monastère n'ont pas participé aux prières. Autant se couper le nez pour jeter le visage. Nous vous tenons responsables de cette situation.

Vous avez en réalité désobéi aux instructions de votre lama racine S.S. le 16ème Karmapa. Vous avez aussi manqué à votre lama racine, en ne rendant pas les clefs de l'Institut Nalanda à son éminence Tai Sitou Rinpoché lorsque votre fonction de Régent principal a expiré. Selon les instructions de Sa Sainteté, les quatre régents devaient à tour de rôle occuper les fonctions de Régent principal et ce chacun, durant trois ans.

Nous avons vu des moines du monastère errant en permanence entre votre résidence et le monastère, tandis qu'aucune prière n'était conduite dans le dukhang principal. Vous avez incité et laissé faire des actes de violence. C'est d'autant plus de déshonneur que ces gens portent la robe du Bouddha.

Vous avez, durant de nombreuses années, rarement assisté à la puja de Mahakala du Nouvel An tibétain, événement important dans le calendrier de Rumtek. Selon vos instructions, même la danse rituelle la plus importante de Mahakala a été supprimée, faisant fi de toutes les normes et les traditions du monastère.

Vous et vos gens, avez dit de nombreux mensonges aux occidentaux innocents et naïfs. En réalité, l'année dernière vous avez appelé les militaires, armés jusqu'aux dents dans le monastère, et vous avez ensuite essayé de faire porter le chapeau par d'autres. Nous, Sikkimais, sommes des gens doux par nature. Jusqu'à présent nous avons été patients parce que nous avions honte d'annoncer que l'un de nos grands lamas est devenu fou dans sa quête du pouvoir. Nous avons été témoins de la dégradation du monastère, et notre patience est désormais épuisée. Nous vous rappelons que vous n'êtes au Sikkim qu'un invité toléré, et seulement parce que nous respectons les robes, même quand celles-ci sont portées par des personnes ambitieuses.

Nous sommes du côté du Karmapa et seulement de son côté. Karmapa réside actuellement dans son siège principal au Tibet et le moment venu, les Sikkimais le mèneront au siège de Rumtek. Tous vos efforts pour créer la discorde au Sikkim sont inutiles. Le "Centre Dharma Chakra" de Rumtek ne vous appartient pas et nous ne reconnaissons pas votre autorité ici. Nous, les gens doux du Sikkim, avons honte de vous avoir écrit une telle lettre dénonçant votre activité portant le ridicule sur la tradition Karma Kamtsang et sur le Dharma du Bouddha.

Vôtre, "

(217 signatures des membres de la communauté bouddhiste du Sikkim)

Que pensent-ils de l’attaque du KIBI en 1996

Extrait d’un article du "Sherab Ling Newsletter" vol. 10 n°1, hiver 1994, écrit par Léa Terhune :

"La controverse entretenue pendant ces deux dernières années par une faction rejetant l'identification du 17ème Gyalwa Karmapa a atteint un nouveau sommet en mars. Shamarpa - avec son cousin, l'ancien Secrétaire général de Rumtek, Tobga Yugyal, et meneur de la faction - a présenté au KIBI (Institut Bouddhiste International du Karmapa) à Delhi, un garçon qu'il affirme être le Karmapa. Depuis plusieurs années, Shamarpa avait menacé de présenter un candidat et avait mentionné plusieurs choix possibles avant sa présentation le 17 mars.

Les membres laïcs et religieux de la communauté bouddhiste tibétaine de New Delhi, du Sikkim, du Ladakh, de l'Himachal, du Pradesh... ont protesté violemment contre la décision de Shamarpa. Des deux côtés, on a commencé à jeter des briques et des bouteilles. La mêlée a continué pendant une demi-heure avant que la police n'intervienne. Plusieurs centaines de tibétains ont participé à la protestation. De nombreuses personnes ont été blessées. À l'intérieur, la faction avait préparé des barres et stocké des briques et des bouteilles.

Peu de temps après l'annonce, le Kashag, Cabinet ministériel du Dalaï-Lama, a publié une déclaration réitérant l'authenticité du 17ème Gyalwa Karmapa, intronisé en son siège historique, le monastère de Tsurphou au Tibet, en septembre 1992. Le 29 mars, une délégation incluant la plupart des membres seniors de la lignée Karma Kagyu a été reçue par S.S. le Dalaï-Lama à Dharamsala. Sa Sainteté a réaffirmé, en des termes on ne peut plus clairs, qu'il ne peut y avoir qu'un seul Karmapa intronisé, et qu'il s'agit d'Orgyen Trinley Dorje, résidant actuellement à Tsurphou au Tibet. En raison de certains articles de presse visiblement mal informés, Sa Sainteté a chargé son cabinet d'organiser une conférence de presse, et ce le 31 mars, afin de clarifier la situation.

La conférence de presse s'est tenue à l'hôtel Meridien à New Delhi le 4 avril. Étaient présents : Tai Sitoupa, Goshir Gyaltsab Rinpoché, Khenchen Thrangu Rinpoché, Bokar Rinpoché, Dzogchen Ponlop Rinpoché, Drupon Rinpoché, Khenpo Lodoe de Sonada, Lama Gyaltsen, le père de Kalou Rinpoché, et M. Tenzin Namgyal, le Secrétaire général du monastère de Rumtek. Cette conférence a été bien couverte par la presse étrangère et indienne. Seul le journal déformant la plupart des événements liés à Rumtek et au Karmapa, n'a pas envoyé de reporters.

Les représentants Karma Kagyu ont indiqué : "Tous les membres de la communauté Kagyu faisons collectivement appel à tous les disciples, et particulièrement aux disciples de notre cher et respecté collègue Shamar Rinpoché, pour honorer l'incarnation sacrée du révéré Karmapa. Nous faisons sincèrement appel à tous les disciples de l'ordre Kagyu, afin que nous puissions nous rassembler et assurer qu'aucun intérêt externe ne brise notre unité. Nous devons travailler ensemble pour la vérité, la paix et l'harmonie durant ces moments difficiles." Cette déclaration donne le ton de la réunion.

Les Tibétains semblent en général être satisfaits de la décision prise par le Dalaï-Lama il y a deux ans. La majorité de la faction s'opposant au 17ème Karmapa semble être seulement constituée de disciples occidentaux d'Ole Nydahl et de Shamarpa en Autriche, en Allemagne, en France et au Danemark.

À propos du soi-disant rapprochement Karmapa/Dalaï-Lama

Extrait d’un commentaire intéressant recueilli sur le site http://www.nalandabodhi.orgl, qui répondait à l’article d’"Asiaweek", paru en octobre 2000. L’auteur est anonyme, comme d’habitude sur ce site, mais il commente chaque jour les informations sur le Karmapa.

Partenariat entre le Dalaï-Lama et le Karmapa comme contre-poids à l’esprit de faction des tibétains

(…) Depuis les années 50, le Dalaï-Lama a été la grande force d'unification par delà les conflits internes, en calmant les rivalités parmi ces factions. Il a été maintenant rejoint par S.S. le 17ème Karmapa dans cette activité de pacification. Ce dernier s’engage pour un rapprochement entre les deux grands rivaux Gelug et Kagyu non seulement dans la communauté exilée, mais également Tibet. Il n'est pas surprenant que ces factions nourries par des siècles de vieilles rivalités peuvent se sentir mal à l’aise face à une menace dirigée vers leurs continuelles rivalités.

(…) Dans un monde où les principaux leaders religieux tibétains ont été forcés à l'exil, la survie du Tibet dépend de la façon d'arrêter ces tensions séculaires qui sapent l'avenir de bouddhisme tibétain lui-même. Le devenir du Tibet ne peut pas simplement reposer sur les épaules du Dalaï-Lama ou du Karmapa, ni sur une seule lignée traditionnelle. L'avenir du Tibet repose sur les épaules des peuples tibétains unis. L’entente entre le Dalaï-Lama et le Karmapa est le meilleur exemple et de ce que pourrait signifier une telle unité. Une simple coopération serait suffisante. Peut-être est-ce cela l'avenir du bouddhisme tibétain, politiquement et spirituellement.

Cette idée de réconciliation est un des éléments importants amenant les gens à soutenir Orgyen Trinley. Ils pensent en effet, qu’il œuvre dans ce sens en se rapprochant du Dalaï-Lama. Cette position séduit bon nombre de bouddhistes occidentaux qui considèrent les vieilles rivalités entre Kagyu et Gelug comme de l’histoire ancienne et qu’il est nécessaire aujourd’hui de tourner la page sur ces jalousies ancestrales. L’intention est excellente, ils ne veulent pas hériter de ces querelles (et ils ont raison), et sont prêts à croire en un vaste mouvement de réconciliation entre les traditions qui pourrait même aller jusqu’à la fusion des écoles bouddhistes entre elles.

Bien que cette opinion soit des plus généreuse, elle reflète une double ignorance : celle de l’histoire récente des Tibétains et celle de la tradition spirituelle. Les querelles entre les traditions ne sont pas des rivalités d’ordre religieux mais uniquement des luttes d’influence politiques, menées au nom de ces lignées. Les authentiques Kagyu ne se sont pas querellés avec les authentiques Gelug.

L’unification des lignées de transmission n’a jamais été un objectif ni pour le 16ème Karmapa, ni pour les autres maîtres spirituels détenteurs de lignées. Dans les années 65, lorsque Dharamsala a mené cette stratégie d’unification des lignées, l’objectif était de détruire l’influence trop importante des religieux. Les bénéficiaires de cette unification auraient dû être les Gelugpa, associés traditionnellement au gouvernement tibétain. Un des maîtres Gelug les plus respectés de l’époque, le tuteur du Dalaï-Lama, Trichang Rinpoché, s’est personnellement opposé à cette politique. Il estimait que si les Gelugpa se retrouvaient la seule tradition, il n’y aurait plus de dynamique entre les lignées et que le bouddhisme risquait de péricliter.

Les livres sur Orgyen Trinley

Depuis janvier 2000, quatre livres ont été publiés en français sur Orgyen Trinley :

- "La fuite du petit Bouddha", Gilles Van Grasdorff, éd. Michel Lafon, mars-avril 2000. (L'auteur a également écrit l'ouvrage sur le Karmapa Thayé Dorje "Le livre bouddhiste de la sagesse et de l’amour", récemment publié). Ce travail n’est pas très sérieux. L'écrivain raconte la fuite de l’enfant en se basant uniquement sur les articles de journaux parus à l’époque et en brodant une histoire romancée.

- "Le Karmapa", Jean-Paul Ribes, éd. Fayard, juin 2000. M. Ribes, Président du Comité de soutien au peuple tibétain, écrit avant tout un livre politique servant la cause qu’il défend, où les informations sont déformées ou biaisées. Même l’interview du Dalaï-Lama ne paraît pas fiable car les affirmations sont assez étonnantes.

- "La fulgurante épopée des Karmapas", Francesca-Yvonne Caroutch, éd. Dervy. Le titre évoque assez bien le contenu très allégorique du livre. On baigne dans le merveilleux et l’apothéose. Il s’agit d’une réédition partielle d’un ouvrage publié en 1980, agrémentée d’une mise à jour sur Orgyen Trinley.

- "La légende du Karmapa", Ann Riquier, éd. Plon, novembre 2000. L’auteur semble avoir écrit le livre sous la dictée du secrétaire de Sitou Rinpoché.

Tous ces ouvrages répètent à peu près le même discours en ignorant totalement les épisodes sombres qui ont émaillé cette dramatique histoire. Ils illustrent bien l’ignorance dans laquelle la reconnaissance d’Orgyen Trinley s’est effectuée. L’histoire qu’ils racontent est merveilleuse. Tout se passe pour le mieux dans le meilleur des mondes. La controverse n’existe pas, ils règlent le problème de Shamarpa dans un court paragraphe, le considérant comme un personnage malveillant ou jaloux ne sachant pas ce qu’il veut. Ils nourrissent simplement la propagande tout en surfant allègrement sur une bonne opportunité commerciale.

Article de Thrangu Rinpoché sur la controverse

Cette interview résume bien le point de vue général des supporters de Sitou Rinpoché.

De "l’United Karma Kagyu Federation Malaysia".

http://www.geocities.com/ukkfmy/karmapa/Thrangu_View.html

Le Vénérable. 9ème Thrangu Rinpoché parle de la controverse Karmapa à Singapour, le 24 mai 2000.

"Au cours de ma pratique, j'ai constamment prié le 16ème Karmapa de me venir en aide pour me permettre de savoir clairement et profondément qui est le réel 17ème Karmapa. C'est en priant avec une motivation pure et avec les bénédictions du 16ème Karmapa, que j'ai conclu avec une certitude absolue qu'Orgyen Trinley Drodul Dorje du Tibet est le 17ème Karmapa. Je suis arrivé à cette conclusion grâce à ma propre pratique et aux bénédictions du Karmapa, S.S. le 17ème Gyalwa Karmapa Orgyen Trinley Drodul Dorje Rinpoché."

Une interview avec Thrangu Rinpoché sur la controverse des Karmapa a été traduite du chinois en anglais par l'Équipe de Traduction TDSPJ. Elle a été réalisée pour le magazine "Pour vous l'information". L'interview a été arrangée par Karma Choying Kunkyab Ling et donnée au Rédacteur en chef du magazine "Pour vous l'information", le Vén. Guang Chao à Karma Choying Kunkyab Ling, Singapour le 24 mai 2000.

"Il y a une controverse sur l'identification du 17ème Karmapa dans la lignée Kagyu. Deux disciples seniors du 16ème Karmapa ont identifié deux garçons différents comme la réincarnation du 16ème Karmapa. Tai Sitou Rinpoché a identifié Orgyen Trinley Dorje du Tibet tandis que Shamar Rinpoché a identifié Thayé Dorje de l'Inde. En conséquence, il semble maintenant qu'il y ait deux 17ème Karmapa. Cela a provoqué beaucoup de confusion parmi les disciples notamment lorsqu'ils ont demandé aux khenpos et aux rinpochés de la lignée Kagyu de clarifier la situation. Ces derniers ont reconnu les deux Karmapa. En revanche, Tai Sitou et Shamar Rinpochés ne reconnaissent pas les deux choix respectifs comme les réincarnations du 16ème Karmapa. Je pense qu’une question controversée de la sorte doit être clarifiée par les religieux les plus anciens de la tradition Kagyu. J'ai récemment été honoré d'une occasion d'interviewer Thrangu Rinpoché. Il est non seulement un religieux ancien, mais il a été aussi un enseignant de Sitou Rinpoché et de Shamar Rinpoché. Je pense qu'il est le mieux qualifié des religieux anciens Kagyu pour clarifier la question et nous informer de la vérité.

Question : N’y-a-t-il jamais eu un tel problème dans la lignée Karmapa ?

Thrangu Rinpoché : S.S. Le Karmapa est le premier à se réincarner dans l'histoire de l'humanité (en tibétain une réincarnation est appelée un tulkou). Sa Sainteté a la lignée la plus longue et l'actuel Karmapa est la 17ème incarnation. À sa mort, chaque Karmapa va en terre pure, puis, conformément à ses aspirations, retourne en ce monde. Il s’est posé la question de savoir qui était le vrai Karmapa, lors des 8ème, 10ème et 12ème réincarnations. Cependant, en comptant sur leur foi en Karmapa et leur détermination à soutenir et protéger Sa Sainteté, les disciples ont été capables de résoudre le problème à chaque fois. Finalement tout s'est arrangé.

Question : Pourquoi y avait-il des controverses et pourquoi ne sont-elles pas devenues des problèmes ? Quelles en étaient les raisons ?

Thrangu Rinpoché : En général, au début d'un tel problème, il y a deux groupes des personnes. Le premier groupe n'a ni la capacité ni les moyens psychiques d'identifier la réincarnation du Karmapa. Il n'a pas non plus la sagesse. Ces personnes comptent uniquement sur leur bagout et sur leur habileté mondaine. Par conséquent elles doutent et se demandent qui est le véritable Karmapa. L'autre groupe est constitué de vrais pratiquants qui ont obtenu des accomplissements. Leur sagesse leur permet de savoir très clairement qui est le réel Karmapa. Le moment survient alors où il y a un désaccord entre ces deux groupes. Le Karmapa est l'incarnation du Bouddha Sakyamuni, de tous les bodhisatvas, de leurs activités spirituelles et de leurs accomplissements. Il est donc est supra-mondain et n'est nullement dérangé par de tels désaccords. Par conséquent, il n'y a pas de problème.

Question : Selon Rinpoché, la controverse sera finalement résolue grâce aux mérites du Karmapa. Mais avant cela, les disciples du Karmapa sont littéralement jetés dans un état de désordre et de confusion. On espère que les religieux anciens de la tradition Kagyu, comme Rinpoché lui-même, éclaireront les disciples Kagyu. Du point de vue de Rinpoché, comment peuvent-ils vérifier exactement qui est le vrai Karmapa ? S'ils ne savent pas comment faire, ils risquent de ne jamais reconnaître leur Karmapa.

Thrangu Rinpoché : C'est une question importante car elle concerne la tradition entière. Je voudrais employer une analogie simple comme exemple. Supposons qu'il y ait deux pommes sur la table, l'une est réelle, l'autre ne l'est pas. Si nous avons faim, il serait bon de choisir la pomme réelle et de jeter la pomme truquée. Sinon, nous risquons de souffrir de la faim. Il en est de même dans l'identification du Karmapa. Les conséquences d'une erreur sont graves. Qui a donc la capacité d'identifier le vrai Karmapa et de montrer aux disciples comment les différencier ? C'est mon devoir, mais aussi le devoir des anciens religieux, des seniors rinpochés dans la lignée Kagyu. Je veux prendre cette responsabilité maintenant. Je veux informer tous mes disciples, et sans équivoque, de la véritable identité du Karmapa qu'ils doivent suivre dans leur pratique du Dharma.

À l'heure actuelle, deux Karmapa ont été reconnus, l'un de l'Inde et l'autre du Tibet. En termes d'affaires temporelles, je n'ai aucun rapport avec eux. Je vis au Népal. Mais au cours de ma pratique, j'ai constamment prié le 16ème Karmapa de m'aider à savoir clairement et profondément qui est le véritable 17ème Karmapa. En priant avec une pure motivation et avec les bénédictions de 16ème Karmapa, j'ai conclu avec une certitude absolue qu'Orgyen Trinley Dorje du Tibet est le 17ème Karmapa. Je suis arrivé à cette conclusion grâce à ma propre pratique et grâce aux bénédictions du Karmapa. Voici également les raisons qui déterminent la véritable identité du 17ème Karmapa :

Tout d'abord, un grand terteun tibétain nommé Chogyur Lingpa a eu des visions. Les prophéties comprenaient des descriptions claires de divers événements concernant les vies du 1er au 21ème Karmapa. Ces descriptions incluent les lieux de naissance des Karmapa et les noms de leurs parents respectifs. Selon ces rendus des prophéties, Orgyen Trinley Dorje du monastère de Tsurphou est le réel Karmapa.

Deuxièmement, lorsque j'étais avec le 16ème Karmapa lors de la fuite du Tibet vers l’Inde, il a écrit une lettre prédisant sa prochaine réincarnation. Parvenu au monastère de Rumtek au Sikkim, il a écrit une seconde lettre, de forme poétique, concernant sa future réincarnation. J'ai lu les deux lettres moi-même. La première exposait clairement qu'Orgyen Trinley Dorje du Tibet est le 17ème Karmapa. La deuxième écrite à Rumtek, déclarait à nouveau clairement qu'Orgyen Trinley Dorje du Tibet est le 17ème Karmapa.

Troisièmement, tous les moines hautement réalisés du bouddhisme Vajrayana, comme S.S. le Dalaï-Lama, S.S. Sakya Trizin et beaucoup d'autres pratiquants religieux compatissants, ont exprimé avec sagesse qu'Orgyen Trinley Dorje du Tibet est le 17ème Karmapa.

Je me sens très fortuné d'avoir obtenu tant de pure évidence, d'avoir trouvé le 17ème Karmapa, d'être capable de me prosterner devant lui. J'espère que vous tous, aurez une motivation pure et que vous tous, saurez qu'Orgyen Trinley Dorje est le 17ème Karmapa. Renoncez consciemment à la pomme truquée. Vous en récolterez un énorme bénéfice.

Question : Rinpoché a dit que le grand maître terteun Chogyur Lingpa avait noté des prophéties allant du 1er au 21ème Karmapa. Quelles étaient celles concernant le 17ème Karmapa ?

Thrangu Rinpoché : Chogyur Lingpa était un contemporain du 13ème Karmapa. Ses prédictions concernaient essentiellement la 14ème à la 21ème réincarnation. Concernant la prophétie du 17ème Karmapa, peu de choses ont été écrites. Néanmoins, plusieurs points importants ont été notés. Le premier point mentionne le Karmapa avec Tai Sitou Rinpoché sur une montagne constituée de rochers et d’arbres luxuriants. Leurs esprits sont inséparablement unis l'un à l'autre. Quant au 15ème Karmapa, il a réalisé le grand accomplissement grâce à sa pratique du yoga en méditant sur les bindus. Il était accompagné de dakinis ce qui montre son engagement dans la pratique de yoga comme le mentionne la prédiction.

La prophétie du 16ème Karmapa était plutôt spéciale. Il est fait mention d'une construction à deux étages. Le 16ème Karmapa, Rangjung Rigpai Dorje est assis au rez-de-chaussée, tandis qu'une statue du Bouddha Sakyamuni est placée au premier étage. Cette illustration montre clairement que le 16ème Karmapa était un moine d'une grande pureté. Elle montre aussi que ses disciples étaient des moines purs. La description du 17ème Karmapa joint avec Tai Sitou Rinpoché montre un désaccord lors de la réincarnation et que l’esprit du 17ème Karmapa et celui de Tai Sitou Rinpoché sont inséparables l'un de l'autre.

Question : Sur la base des ces prédictions, Rinpoché a conclu qu'Orgyen Trinley Dorje, joint avec Tai Sitou Rinpoché, est le réel Karmapa. De plus, Rinpoché a affirmé qu'il avait lu les deux lettres écrites par le 16ème Karmapa. Pourrait-il en détail nous en donner le contenu ?

Thrangu Rinpoché : La première lettre de deux pages a été écrite par le 16ème Karmapa lorsqu'il était au Tibet. À son arrivée au Sikkim, il a demandé à l'imprimerie Camata d’en éditer un grand nombre de copies. Beaucoup ont eu la chance de pouvoir lire cette lettre. La seconde, écrite à Rumtek, au Sikkim a également été lue par de nombreuses personnes. L'Abbé du monastère de Rumtek a demandé au Karmapa, l'autorisation de la faire imprimer pour une diffusion plus large. Mais le Karmapa en a autorisé seulement 50 copies. Le point commun et essentiel des deux lettres faisait mention du retour de la 16ème réincarnation au Tibet. Il était notamment écrit : "Je suis maintenant en Inde, mais je retournerai au Tibet très bientôt". Cependant, lorsqu'il s'entretenait avec ses disciples, il disait habituellement, "je ne retournerai pas au Tibet". Seulement plus tard, ses disciples ont compris que son prochain retour au Tibet était en fait la prédiction de sa prochaine intronisation au Tibet.

Question : Cette information est inestimable et prouve qu'Orgyen Trinley Dorje est le réel Karmapa. Comment Shamarpa peut-il s'y opposer ? Ancien disciple de Rinpoché, comment peut-il avoir des vues différentes de celles de son ancien enseignant ?

Thrangu Rinpoché : Avant l'identification du 17ème Karmapa, j'avais discuté avec Shamar Rinpoché. Je lui avais conseillé de ne pas procéder à une identification différente, de ne pas créer de problème. En effet, dans l’intérêt de notre maître et connaissant les conséquences d'une décision de cette importance, j'espérais que tous ceux impliqués dans cette affaire ne tiendraient pas compte de leurs propres intérêts personnels. Mais un membre de sa famille, décédé depuis, s'est catégoriquement opposé à ma suggestion. Shamar Rinpoché n'a pas non plus accepté mon conseil. De ce fait, je n'estime pas devoir le conseiller à nouveau. Un pratiquant du Vajrayana n'a nullement besoin de se disputer dans la recherche de son maître refuge. Ceci est très important.

Question : J'ai entendu dire que Shamar Rinpoché avait voulu faire examiner scientifiquement la lettre écrite par le 16ème Karmapa. Pourquoi une telle demande ?

Thrangu Rinpoché : Les deux lettres mentionnées plus haut ne sont pas le document que Shamar Rinpoché voulait faire examiner. Quant à l'expertise, je pense personnellement qu'elle est inutile. Les documents laissés par les quinze Karmapa du passé sur leur prochaine réincarnation, n'ont jamais été soumis à un examen légal. Chaque controverse a finalement été résolue grâce à la foi des disciples en Karmapa et grâce à ses bénédictions. De même, dans le cas présent, il n'est pas nécessaire de faire examiner les documents devant les tribunaux. De nombreux moines haut placés et pratiquants ont, grâce à leur compassion et à leur sagesse, désigné clairement qui est le Karmapa. Nous devons simplement nous soumettre à leur décision. En outre, l'examen légal est généralement employé contre des criminels. Tous les documents de prédiction laissés par les Karmapa sont non seulement sacrés, mais aussi bénis. Les expertiser comme s'il s'agissait des preuves laissées par des criminels est plutôt étrange du point de vue religieux. En conclusion, un examen légal est inutile.

Question : Il y a maintenant deux Karmapa en Inde. L'un est véritable, l'autre ne l'est pas. Rinpoché a-t-il envisagé l'intronisation d’Orgyen Trinley Dorje, portant la coiffe noire, au monastère de Rumtek lors d'une cérémonie suivie par Leurs Saintetés, rinpochés et khenpos, invités des diverses écoles de la tradition du Vajrayana ? Et ce, afin d’obtenir leur reconnaissance ? A-t-il un tel plan ?

Thrangu Rinpoché : Le couronnement avec la coiffe noire sera accompli en temps utile. C'est par compassion, et par son aspiration à libérer tous les êtres sensibles que le Karmapa est revenu au sein de sa lignée. Une telle bénédiction ne peut que favoriser les activités du Dharma. Il n'y a pas à s'inquiéter.

Question :Un grand nombre des disciples Karma Kagyu suivent Shamarpa. Si après votre enseignement ils croient désormais qu'Orgyen Trinley Dorje est le réel Karmapa, comment vont-ils faire face à leur enseignant Shamarpa ?

Thrangu Rinpoché : C'est le problème de la pureté du toute la lignée Kagyu. La lignée des Karmapa est restée intacte grâce à la transmission continue de toutes les bénédictions de la pratique du Dharma, des méthodes, des initiations, de la transmission orale, des mantras et des enseignements. Si la lignée du 1er au 17ème Karmapa est pure, nous recevons alors une bénédiction pure. Ceci est extrêmement important et c'est la raison pour laquelle nous suivons le Karmapa Orgyen Trinley Dorje. Si les disciples de Shamar Rinpoché estiment que le Karmapa qu'il a choisi n'est pas le véritable, mais continuent cependant à suivre Shamarpa, parce que la question du vrai et du faux ne leur importe peu, alors ils font erreur. Si vous croyez qu'Orgyen Trinley Dorje est le Karmapa, votre foi et la bénédiction de votre maître vous mèneront naturellement auprès de lui. Et vous quitterez naturellement Shamar Rinpoché.

Je voudrais préciser que je ne donne pas cet enseignement en me rangeant aux côtés de Tai Sitou Rinpoché. Je ne veux pas appuyer Tai Sitou ou Gyaltsab Rinpoché. Je n'essaye pas non plus de critiquer Shamar Rinpoché ou de nier sa position. Le but réel de cette discussion est aujourd'hui d'expliquer clairement que, dans la pratique du Vajrayana, le refuge est la question la plus importante. La personne/image en qui nous exprimons notre aspiration et disons notre prière doit être claire et pure, cela nous sera d'une grande aide. Au contraire, si la personne en qui nous prenons refuge et à qui nous disons notre prière est un imposteur, le résultat de notre pratique en pâtira. Je voudrais fortement souligner ce point aujourd'hui car mon but est de guider les pratiquants Karma Kagyu vers leur véritable refuge. J'espère que tous comprendront le sens de cette discussion pris sous l'angle de la pratique du Dharma.

Question : Selon l'enseignement de Rinpoché, les pratiquants Karma Kagyu prennent refuge en Karmapa et le visualisent comme leur lama racine. S'ils prennent Shamarpa comme maître, et pensent que Thayé Dorje est le Karmapa, il n'y a pas de problème. En revanche, s'ils ne croient pas en Thayé Dorje, mais en Orgyen Trinley Dorje, trahissent-ils alors leur maître ? Quelle doit être leur attitude ?

Thrangu Rinpoché : Je ne prends pas parti, mais je voudrais seulement dire aux disciples Kagyu, qu'ils doivent déterminer quel chemin spirituel ils veulent suivre dans leur pratique du Dharma. C'est la chose la plus importante à faire. Les disciples de Shamarpa qui ont des doutes quant à ses choix, ne doivent pas le critiquer. Ils ne doivent cependant pas continuer à étudier le Dharma avec lui. Ceux qui ont foi en Orgyen Trinley Dorje, se tourneront naturellement vers lui pour recevoir l'enseignement du Dharma.

Question : Si les disciples de Shamar Rinpoché prennent refuge en Orgyen Trinley Dorje, de quels khenpos et rinpochés doivent-ils recevoir les enseignements du Dharma ?

Thrangu Rinpoché : Ils ne doivent pas critiquer Shamar Rinpoché, mais ils peuvent étudier le Dharma avec de nombreux rinpochés disciples d'Orgyen Trinley. Comment trouver un nouveau gourou ? Pour trouver un maître, il faut continuer à observer. Lorsque vous estimez que le discours, la conduite et l'enseignement du Dharma d'un enseignant sont purs, vous pouvez alors développer la confiance nécessaire à l'étude du Dharma. Si un rinpoché vous dit, "Venez, soyez mon disciple", alors méfiez-vous. Si l’on n'est incapable de déterminer qui est le véritable Karmapa, peut-on les visualiser tous les deux sa pratique ? Un proverbe tibétain dit ceci : "on ne peut pas réussir avec deux avis, on ne peut pas coudre avec deux aiguilles". Les deux avis signifient l'absence de détermination, on ne peut donc pas espérer beaucoup de réussite. Il en va de même avec la visualisation de deux Karmapa dans la pratique du Dharma. On peut regrouper deux types de personnes : les premières n'ont foi ni en l'un ni en l'autre, mais pensent tout de même que l'un des deux est le véritable Karmapa. Leur motivation pour la pratique est limitée à 50 %, donc le résultat qu'elles pourront obtenir dans l'avenir ne sera pas total. Les autres ont pratiqué avec le 16ème Karmapa. Ils ne sont pas sûrs de sa réincarnation, ni s'il est revenu dans le monde des humains. Ils pensent que, quelle que soit la situation, il vaut mieux suivre le 16ème Karmapa. Puisqu'il est déjà décédé, ils visualisent désormais deux 17ème Karmapa et prennent refuge en eux deux. Leur pensée n'est pas juste, personne ne doit prendre refuge dans la confusion. Il est au contraire nécessaire d'avoir une conviction pure en un seul Karmapa et en son retour. Je suis Thrangu Tulkou. Que ma réincarnation soit unique ou multiple n'affecte pas beaucoup la tradition Karma Kagyu. En revanche, il n’y a toujours eu qu’une seule réincarnation, à un moment donné, du Karmapa. Et c'est ce que les disciples doivent fermement croire.

Question : Chaque disciple du 16ème Karmapa, qui a pris refuge avec lui et qui en a reçu les instructions et les sadhanas, peut-il seulement continuer à suivre le 16ème Karmapa sans se soucier du 17ème ?

Thrangu Rinpoché : C'est illogique. Prenez un exemple : jusqu'à l'âge de 30 ans, j'avais foi en mon père, puis, entre 30 et 40 ans, je n'ai plus cru en lui. Cela voudrait-il dire j'ai toujours cru en lui ? Peut-être. Dans la lignée des Karmapa, les disciples doivent non seulement avoir une foi sincère en le 1er Karmapa mais en toutes ses réincarnations. C'est grâce à cette croyance ferme que la lignée reste intacte.

Question : Rinpoché a affirmé à plusieurs reprises qu'il y a un seul Karmapa. Toutefois, j'ai appris récemment qu'il pourrait y avoir des manifestations du corps, de la parole et de l’esprit du Karmapa. Il pourrait donc y avoir de nombreuses réincarnations du Karmapa. Existe-t-il un seul ou plusieurs Karmapa, à un moment donné ? A-t-on connu plusieurs incarnations dans l'histoire des Karmapa ?

Thrangu Rinpoché : Lorsque certains lamas renaissent, ils manifestent des réincarnations du corps, de la parole et de l’esprit afin de diffuser plus largement leur action de libération des êtres sensibles. Le Karmapa, lui, ne manifeste qu'une seule réincarnation.

Question : De nombreux khenpos et rinpochés viennent à Singapour pour enseigner et diffuser le Dharma. Lorsqu'on leur demande qu'elle est la véritable identité du Karmapa, en règle générale ils n'expriment jamais leur position. Car ils sont en bons termes avec Shamar Rinpoché et ne veulent offenser personne. Que pense Rinpoché de ces lamas ?

Thrangu Rinpoché : De nombreux lamas Karma Kagyu donnent en effet l'impression d'être neutres, ils n'offensent aucun parti. Mais ils ne se soucient guère de la pratique de leurs disciples, ils ne désirent pas véritablement enseigner le Dharma à leurs disciples. Lorsque vous enseigner le Dharma et ce, de façon authentique, vous ne pouvez pas être ambiguë, ni hésiter ou faire des réserves. Personnellement, je suis plutôt indifférent aux critiques disant que je protège Orgyen Trinley Dorje. Mon véritable souci est que chacun de mes disciples puisse suivre une lignée pure, et développer la bodhicitta et la compassion pour atteindre l’Eveil. Mon aspiration d'enseignant du Dharma est de m'occuper et de me soucier de chaque être sensible.